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Quand la maladie rare et chronique progresse !
Du vélo au fauteuil roulant !

Je cherchais une photo précise sur mon portable parmi les milliers qui y sont stockées. Je tombe sur cette photo de Charles à vélo au parc à côté de chez nous. Je souris alors presque heureuse des bons souvenirs qu’elle fait resurgir en moi. Comme si cette photo appartenait au bon vieux temps dont je n’avais pas conscience ce jour-là… et la joie est perceptible sur mon visage. Je m’affale dans un confortable fauteuil  quelques instants pour me remémorer cette période.  J’aimais tout particulièrement ces après midi où nous étions tous les deux à la maison. En fin de journée nous avions ce besoin d’aller ensemble nous  promener dans la nature et d’ajuster nos rythmes lui ses pédalages et moi mes pas. Heureux d’être ensemble pour observer la nature luxuriante de la Gaudinière et plus particulièrement les gigantesques et très vieux  arbres, les nombreuses  et magnifiques  fleurs sur un fond de bavardage de tout et de rien, en mode confidence… C’était notre moment à tous les deux en dehors de la maison.

 

Accepter la réalité d’une maladie sans traitement

Quelques instants après, je ressens une émotion de tristesse, puis un frisson et  je m’assois. Je prends le temps de remonter le temps. Quelle année déjà ? Ma mémoire fouille le temps. Les bons et les moins bons souvenirs remontent les uns après les autres. Je cherche désespérément des indicateurs pour retrouver l’année. C’était en 2019. Non. Grâce à un déclic, cette photo date de la fin d’année 2018. Seulement trois années. Trois petites années et pourtant ! Cependant je mesure l’ampleur de l’empreinte de cette terrible maladie qui ne cesse d’évoluer. Elle agit comme un traître, insidieusement, sournoisement. Remarquer tous les changements à chaque étape c’est vivre une succession de deuils. Accueillir l’ emprise de la maladie est si dur, voire cruel.

 

Oser prendre la décision

C’est en cette fin d’année que la décision a été prise de remplacer le vélo par un fauteuil roulant manuel. Nous avons reculé, attendu le plus tard possible. Accepter l’évolution de la maladie est tout un cheminement.
D’abord le déni vient vous murmurer : “non c’est pas possible ! pas si vite !”
Puis la colère surgit à son tour : “c’est pas juste” “Oh zut tous les dossiers encore  à monter avec cette décision”. Grrrr.  Finalement, le répit n’existe pas.

Parfois renoncer à batailler et passer à l’étape est la meilleure solution pour maintenir une vitalité.  La mobilité est si importante. Elle permet aux muscles de se maintenir. Dès qu’on s’immobilise, la perte de mobilité peut aller très vite et dans ces situations complexes toujours de façon irréversible. C’est un pas immense à franchir que de passer au fauteuil roulant que nous devons pousser. Il est donc nécessaire par exemple d’avoir un coffre de voiture suffisamment vaste pour l’y loger. Certains endroits ou certains chemins deviennent quasi impraticables en fauteuil roulant. Il est donc nécessaire de réapprendre à faire autrement, de découvrir de nouvelles façons de faire tout comme de faire face à de nouvelles situations, de capituler devant certains souhaits.

Quel chemin exigeant !

Un bon choix pour le bonheur de Charles

Charles devenu adolescent a ce besoin d’autonomie. Et depuis le fauteuil manuel a été remplacé par un fauteuil roulant pliable avec motorisation électrique. L’acquisition a été plus simple et nous avons fait fi des dossiers administratifs. Nous avons tout simplement osé faire appel aux dons en ligne  via “La cagnotte des proches*”. Merci à cette très belle chaîne de  générosité, composée  d’amis comme de personnes inconnues qui suivent Charles via les réseaux. Grâce à cette nouvelle acquisition, Charles peut  se balader comme se déplacer malgré une grande  fatigue sans l’accentuer.  C’est un vrai bonheur pour lui comme pour nous  de pouvoir aller voir des expositions d’art, d’acheter ses mangas, de déguster un cocktail en ville. Aujourd’hui il préfère la ville au parc.  Ces moments magiques sont des vrais instants de bonheur et de normalité pour lui comme pour nous. Et surtout nous n’avons plus à le pousser, seulement à l’aider à passer les nombreux obstacles comme les trottoirs et autres. Il a gagné en autonomie !

Prochaine étape, le laisser vaquer tout seul avec son fauteuil sans nous…

Nous sommes impuissants devant la maladie. Finalement elle gagne tout le temps car elle progresse sournoisement mais aussi de manière visible et invisible. Devons-nous capituler? Alors non jamais! Même si, elle aura le dernier mot aussi nous décidons et affirmons haut et fort que nous avons décrété de vivre pleinement et intensément tous ces beaux et bons moments de vie.

Nous avons appris à reprendre le dessus lorsque la maladie est en sourdine. Nous savons trop bien que tout est fragile et tout peut basculer alors nous conjuguons à tous les temps le verbe VIVRE. Et plus particulièrement au présent. C’est le meilleur pied de nez que nous pouvons infliger à cette maudite maladie.

 
 
c au musé

*Légende de la chronique : *C’est une cagnotte en ligne, sans frais et solidaire dédiée aux familles et aux patients. La première cagnotte en ligne pour collecter de l’argent rapidement. https://www.lacagnottedesproches.fr/

 

Emmanuelle Rousseau

Nantes, fin d’année 2021 reprise en juin 2022

Auteur de « Drôles de bulles » aux éditions Salvator
http://www.drolesdebulles.fr/

2 commentaires sur “Quand la maladie rare et chronique progresse !
Du vélo au fauteuil roulant !”

  1. Merci Emmanuelle pour ce nouveau partage très sensible et très beau
    Charles sortira seul comme tous les adolescents grâce à ce chouette fauteuil et je lui souhaite de belles rencontres
    Je t’embrasse
    Sophie

  2. Chère Emmanuelle , quelle présence et quelle volonté tu as chère Emmanuelle de déplacer de contourner de transformer cette si lourde épreuve !
    Tu subies mais aussi tu transformes !
    Quelle force tu as même si tu dois crouler chaque jour tu te relèves aussi
    C’est la force de ton amour qui est la source de tout cela ! C’est ton amour immense et ton admiration qui est aussi la notre pour Charles .
    Tes victoires de chaque jour sur la peine et la fatigue intrinsèques font que tu peux être fière de toi et de Charles qui lui aussi lutte pour trouver , tailler des petites fenêtres dans cette obscurité.
    Je t’embrasse ainsi que Charles de tout cœur.
    Sophie

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